السبت، 20 أكتوبر 2012

Dynastie des Alaouites


Les Alaouites (al-Alaouiyoune) (à ne pas confondre avec les Alaouites de Syrie), au pouvoir au Maroc depuis le xviie siècle, sont originaires du Tafilalet. D'après la légende les Alaouites descendent de Mohamed Nefs Zakiya (« Âme Pure »), lui-même fils de Abdallah El-Kamil, fils de Hassan El-Mouthanna, fils de Hassan Sibt, fils aîné d'Ali Ibn Abi Talib, gendre et cousin du prophète de l'islam, Mahomet. Mohamed Nefs Zakya fut proclamé Mahdi en 737 et tué au combat en 762. Théologien éminent, il a laissé la réputation d'un saint homme et vécut sous le règne du calife Al-Mansour. Les Chérifs alaouites se disent originaires de Yanboâ an-Nakhil, une oasis située dans la péninsule arabique, appelés à venir au Maroc par de nobles pèlerins berbères du Tafilalet au xiiie siècle : Hassan Dakhil, se réclamant 21e descendant du prophète Mahomet, 17e descendant de Nefs Zakya, se serait installé alors en 1266 à Sijilmassa. Son 5e descendant, Moulay Mohamed ben Cherif, est le père du premier sultan de la dynastie alaouite, Moulay Rachid ben Chérif.


Intérieur de la Mosquée Hassan II, construite par le roi alaouite du même nom.
Lointains descendants d’Ali, gendre du prophète de l'islam, Mahomet, cette dynastie gouverne aujourd’hui encore le Royaume du Maroc. Originaires du Tafilalet, leur fondateur n’est autre que Moulay Ali Chérif du Maroc qui, en 1631 règne sur sa région natale. Après sa mort prématurée en 1636, son successeur décide de reprendre les rennes et continue ce que son père avait commencé. Prenant les devants, il va prendre le pouvoir aux Saadiens de façon stratégique. Son frère, Moulay Rachid, va l’aider en s’emparant du Rif et de Fès. Les rivaux potentiels, comme la zaouïa de Dila et le Tazeroualt des Semlalides, entités à base théocratique et tribale, sont vaincus et soumis. Moulay Rachid deviendra sultan en 1666 et écrasera les révoltes qui sévissent à Marrakech. Une chute de cheval qui lui est fatale projette son successeur, Moulay Ismail à la tête du sultanat en 1672. Cette date rime avec autorité, le nouveau sultan purge à coups de sévères répressions toute forme d’opposition à son régime. Ce qui permettra enfin à l'Empire chérifien d'accéder à la puissance, à la sécurité et à la crédibilité auprès de ses protagonistes étrangers. Moulay Ismaïl forme une grande armée composée essentiellement d'esclaves-soldats noirs originaires du Sénégal, du Mali et de Guinée (les Abid al-Bukhari, équivalent marocain des Janissaires et des Mamelouks de l'Empire ottoman) et de soldats issus de tribus militaires arabes comme les Oudayas. Grâce à cette force dont l'effectif atteint 150000 hommes49, Moulay Ismail chasse les Ottomans venus d’Algérie qui tentent d'occuper Oujda, les Espagnols qui tenaient Larache et Asilah et les Anglais installés à Tanger. Les prisonniers de guerre seront détenus dans la célèbre prison de Meknès, sa capitale, et leur rançon permettra de financer d’importantes rénovations. Parallèlement, le Maroc se tourne vers les puissances étrangères et nouera des relations diplomatiques et commerciales avec ces dernières. L’une des plus connue étant la demande de mariage avec l’une de filles de Louis XIV, la princesse de Conti (Marie Anne de Bourbon (1666-1739)). La mort du célèbre sultan entraînera une nouvelle période de troubles internes. La famine et la peste font des ravages parmi la population. Sept fils de Moulay Ismail tentent de se faire reconnaître comme souverains de l'Empire chérifien, mais sont périodiquement renversés par les Abids tandis que l'anarchie gagne les tribus, les provinces et les villes aux ambitions autonomistes. L'anarchie ou siba gagne en importance et met à mal l'autorité d'un makhzen affaibli par les querelles dynastiques.
Mais en 1757 la montée de Mohammed III du Maroc au trône, un profond croyant dont le principal souci est le développement de son sultanat, amorce le début d’une nouvelle ère. Alors que Moulay Ismaïl était intransigeant et ferme, Mohammed III penchait plus pour une politique plus souple. Il allège les impôts et conclut la paix avec les Espagnols après avoir repris Mazagan aux Portugais. Tout aussi soucieux de l’économie, il signe des traités commerciaux avec le Danemark, la Suède, l’Angleterre, l'Espagne, le royaume de Naples, la République de Venise et les jeunes États-Unis. Le Maroc est d'ailleurs le premier pays à reconnaître l’indépendance américaine. Moulay Yazid Ben Abdallah règne deux ans sur l'empire après la mort de Mohammed III en 1790. Ses successeurs subissent la politique expansionniste européenne, et de par ce fait participent avec les Algériens dans leurs guerre contre la France (Bataille d'Isly et défaite en 1844, puis guerre hispano-marocaine de 1860). Ces tensions avec les puissances occidentales se poursuivront durant plus de trente ans. Et le Maroc, en jouant habilement des rivalités étrangères, parviendra tant bien que mal à préserver son indépendance, du moins jusque sous le règne de Hassan Ier.
En 1906, la Conférence d’Algésiras placera le Maroc sous contrôle international et accordera à la France des droits spéciaux50. Ces droits sont néanmoins contestés par l'Allemagne de Guillaume II, qui convoite l'Empire chérifien et se heurte aux appétits français (affaires marocaines de la crise de Tanger et du coup d'Agadir en 1905 et 1911).


après le Traité de Fès.
Avec le Traité conclu entre la France et le Maroc le 30 mars 1912, pour l'organisation du Protectorat français dans l'Empire chérifien à l’issue d’âpres négociations entre Berlin et Paris, le pays devient un protectorat espagnol au Nord et au Sud, tandis que le centre revient à la France. Dans le système de protectorat, le sultan et le makhzen traditionnel sont maintenus, mais la réalité du pouvoir appartient au résident général et au haut-commissaire, qui représentent respectivement la puissance de tutelle française à Rabat et espagnole à Tétouan. La ville de Tanger constitue une zone internationale. Ce système est contesté par le mouvement nationaliste à partir des années 1930, et surtout à l'issue de la Seconde Guerre mondiale.
Le Maroc accède officiellement à l'indépendance en 1956.
Le pays redevenu royaume se trouve confronté dès lors à des enjeux d'ordre politiques, économiques et sociaux ; il se doit en effet supporter sa nouvelle économie et surmonter les difficultés dues à l’indépendance. En 1961, Mohammed V décéde, laissant le trône à son fils Hassan II.
En 1963, lors de la Guerre des sables, il s'oppose à l’Algérie . Le pays est marqué en 1965 par les émeutes de 1965 à Casablanca et bascule dans l’"état d’exception" jusqu’en 1970. Les deux ans qui suivront seront marqués par deux coups d’état militaires avortés, à l’issue desquels la constitution est modifiée. En novembre 1975, l’ensemble des partis politiques joignent leurs efforts au souverain dans son projet de Marche Verte. Au fil du temps, le royaume retrouvera sa stabilité politique. Durant les deux dernières décennies du xxe siècle, une succession d'années de sècheresses entraîneront une crise économique et sociale. Le Roi Hassan II décède en juillet 1999. Son fils, Mohammed VI, lui succède. Douze années après le début de son règne, le Maroc est touché en 2011 par le printemps arabe et connaît une série de manifestations populaires, Le roi fait alors approuver une nouvelle constitution par référendum. Les élections législatives qui s'ensuivent sont remportés par les islamistes du PJD.

République du Bouregreg (1627 - 1668)


L'éphémère République du Bouregreg, connue aussi sous le nom de République de Salé, fut une république maritime, qui a existé à l'embouchure du fleuve Bouregreg durant la période allant de 1627 à 1668. Elle était formée des trois cités : Salé, Rabat et la Kasbah (aujourd'hui quartier de Rabat), où siégeait le diwan. Le développement de ces deux dernières cités, situées sur la rive gauche de l'embouchure du Bouregreg, est à l'origine de l'actuelle ville de Rabat, appelée alors « Salé-le-Neuf ».
Ce petit État est parfois appelé République des pirates du Bou Regreg, car il s'agissait effectivement d'une association de pirates, ou tout au moins de corsaires. Née de l'arrivée des musulmans (habitants d'Hornachos tout d'abord, puis Morisques andalous) expulsés par décision du roi d'Espagne, cette communauté de pirates, à l'abri des attaques derrière les hauts-fonds protégeant l'entrée de l'embouchure du Bouregreg, prospéra en attaquant des navires et en effectuant des raids jusqu'en Cornouailles, et même en Islande. Elle laisse au Royaume-Uni le souvenir des Sallee Rovers (« les écumeurs des mers de Salé »), comme en témoignent les aventures de Robinson Crusoé, captif des corsaires de Salé.

Dynastie des Saadiens


Au début du xvie siècle, les Saadiens44 ou Sa`dides45 dirigent des tribus venues de la vallée du Draâ, exaspérées par les offensives chrétiennes, qui se révoltent contre les Berbères wattassides et les chassent du pouvoir. Les Saadiens, appelés parfois Zaydanides [7], constituent une dynastie arabe chérifienne originaire de la vallée du Draâ. Elle arrive au pouvoir en 1511 avec le sultan Abou Abdallah Mohammed et choisit Marrakech pour capitale définitive après Taroudant. À partir de 1554 elle contrôle l'ensemble du Maroc, alors que le Maghreb central et oriental est sous la domination des Ottomans. Mohammed ech-Cheikh est un adversaire résolu du sultan-calife ottoman Soliman le Magnifique. Pour conjurer la menace exercée par les gouverneurs turcs d'Alger, le sultan saadien n'hésite pas à chercher l'alliance des Espagnols qui occupent Oran et lui permettent de s'emparer de Tlemcen. Malgré un raid dévastateur contre Fès les troupes ottomanes ne pénètrent pas vraiment l'intérieur du territoire marocain, et les Saadiens peuvent étendre leur occupation sur le nord-ouest algérien46. La diplomatie de Mohammed ech-Cheikh lui vaut l'inimitié tenace de la Sublime Porte. En effet, en 1557 des assassins à la solde du pacha turc Hasan Corso décapitent le sultan marocain et envoient sa tête en trophée à Istanbul, où Soliman peut contempler ainsi son implacable ennemi de l'ouest. Ce meurtre n'a cependant pas d'incidence sur le front militaire et consolide même les assises de la dynastie saadienne47.
L'apogée de cette dynastie se situe sous Ahmed al-Mansur Saadi (1578-1603) qui, tout en maintenant l'indépendance marocaine face à Istanbul, établit un État fort dont la force militaire s'inspire des innovations ottomanes (organisation de régiments et de logistiques sur le modèle turc). Après la conquête de l'Empire songhaï en Afrique de l'Ouest par le général Yuder Pacha en 1591, le Mali constitue le pachalik marocain de Tombouctou et de Gao, principal pourvoyeur d'or du makhzen saadien qui dispose ainsi des moyens de sa politique de prestige. Le sultan al-Mansur établit une alliance stratégique avec l'Angleterre d'Élisabeth Ire, dirigée contre l'Espagne de Philippe II. Ahmed al-Mansur développe également la culture de la canne à sucre notamment dans la région de Chichaoua et dans le Souss. Le sucre marocain exporté en Europe devient une source importante de revenus pour le makhzen, tout comme les produits subsahariens (l'ivoire et surtout l'or de la vallée du fleuve Niger, néanmoins concurrencé par l'or en provenance de l'Amérique espagnole). Toujours sur la scène africaine, Ahmed al-Mansur met en avant ses prérogatives califales de commandeur des croyants et se fait reconnaître comme tel jusqu'au Tchad par le royaume du Kanem-Bornou en 158248.
Marrakech retrouve une partie de sa gloire de l'époque almohade. Les sultans font bâtir des médersas (la célèbre medersa Ben Youssef), des mosquées, réaménagent les jardins (comme celui de la Ménara), mais c'est surtout le fabuleux palais El Badi, réalisé en matériaux précieux, qui contribue au rayonnement de la capitale saadienne et à la réputation fastueuse de la dynastie. L'attrait culturel pour le Maroc s'exprime jusqu'en Europe avec les écrits d'Agrippa d'Aubigné mais encore avec William Shakespeare et son Othello. Ahmed al-Mansur, qui maîtrise parfaitement l'italien (appris au cours de son exil de jeunesse à Alger), entretient une correspondance avec Élisabeth Ire, Henri III et Henri IV, et se montre fort intéressé par les dernières avancées techniques de l'Occident. Le prestige des Saadiens auprès des chancelleries européennes remonte à la Bataille des Trois Rois, le 4 août 1578, au cours de laquelle les troupes commandées par Abu Marwan Abd al-Malik mettent en déroute la croisade portugaise du roi Sébastien Ier du Portugal, marquant ainsi la fin définitive des grandes offensives ibériques contre le Maghreb.

Liens avec Al-Andalus


En l’an 711, le gouverneur Moussa envoie son commandant Tariq ibn Ziyad à la conquête de l’Hispanie, qui est alors affaiblie par la division. Son armée est majoritairement berbère car il craint une révolte de ces derniers au Maghreb fraîchement conquis. Ils traversent le détroit de Gibraltar qui porte d’ailleurs aujourd’hui encore son nom d’étymologie arabe (Jebel Tariq en arabe, soit la montagne de Tariq) au nombre de 12 000 soldats. L’attaque musulmane est fulgurante et imprévue, toutes les contrées wisigothiques tombent l’une après l’autre, en quelques mois à peine, la plus grande majorité de la péninsule Ibérique est sous l’emprise musulmane. Les incursions arabo-berbères continuent tout de même en Occident, avec des raids et des sièges en Gaule (Prise de Narbonne en 719). Mais c’est là la fin de l’avancée inexorable de l’empire musulman, la contre-attaque Franc et les révoltes internes font essuyer à l’armée plusieurs défaites, notamment celle de Toulouse en 721 et celle de Poitiers en 732. En l’an 759, les Arabes et les Berbères sont définitivement chassés de Gaule avec la reconquête de la Septimanie par les Carolingiens.
Les révoltes berbères qui ont été l’une des principales causes de l’arrêt de la conquête en Occitanie continuent tout de même durant plus de quinze ans, parallèlement à des guerres de successions, des renversements de pouvoirs, etc. Cette période de trouble interne marque une sombre tache dans l’histoire d’Al andalus.


La Giralda, minaret de l'ancienne Grande mosquée de Séville construite sous les Almohades
Aussi insolite que cela puisse paraître, c’est le chaos qui a ramené l’ordre en Al-Andalus. Car à plus de 3 628 kilomètres de là, à Damas, la capitale de l’empire islamique, un coup d’État porté par les Abbassides contre les Omeyyades conduit au massacre de ces derniers. Mais il en reste encore un : Abd al-Rahman Ier, petit neveu du dernier Calife et légitime empereur. Il va fuir la mort et s’exiler en Al-Andalus. Né d’un père arabe et d’une mère berbère, il est l’homme idéal pour réunifier la péninsule Ibérique, c’est ce qu’il fait d’ailleurs en unifiant les tribus et en prenant le pouvoir. Il fonde alors l'Émirat de Cordoue en même temps qu’il se proclame Emir et instaure sa dynastie en 756. Petit à petit, l’émirat qui jouit enfin d’une stabilité politique prospérera. A un tel point que sous l’autorité du petit-fils d’Abd-al Rahman Ier : Abd al-Rahman III, l’Andalousie se coupe de l’autorité de Bagdad et transforme l’Emirat en Califat indépendant en 929. C’est alors l’apogée d’Al-Andalus, les arts et les lettres font partie inhérente de la culture andalouse, le roi Al-Hakam II (962-976) possédera la plus grande bibliothèque de l’époque. La grande mosquée de Cordoue est achevée, constituant ainsi l’une des plus grandes mosquées au monde et surtout l’une des plus belles et prestigieuses... Ainsi la paix aura duré plus de deux siècles en Hispanie musulmane… En 976, Al-Hakam II meurt en ne laissant pour seul héritier qu’un petit garçon de 11 ans. Le Califat est pris en main par Ibn Abi Amir, en attendant que le prince grandisse. Ibn Abi est surnommé (Almanzor, le victorieux المنصور ) pour son succès face aux royaumes chrétiens au nord. Mais à mesure qu’il réussit, il se sent de plus en plus important et tente d’imposer sa propre dynastie, provoquant une guerre civile avec les légitimistes. Les divergences politiques sont telles que l’Andalus se morcèle en une vingtaine de taïfas (minuscules parcelles de terres rivales). Nous sommes alors en 1031 et il faudra attendre cinquante-cinq ans encore pour voir Al-Andalus réunifiée.
En effet en 1086 alors que la Reconquista avance irrésistiblement en Andalousie morcelée, les Berbères Almoravides sont appelés à la rescousse par les taïfas. C’est à la fois une bonne et une mauvaise idée. Bonne parce qu’elle permet de freiner durablement la reconquista, mauvaise parce que les Almoravides prennent le pouvoir et dissolvent les taïfas, annexant les terres d’Al-Andalus à leur empire. Ainsi durant plus de 61 ans, une partie du Maghreb et d'al-Andalus ne feront plus qu’un. Mais en 1147, Al-Andalus sombre de nouveau dans une seconde période de taïfa, après la prise au pouvoir par les Almohades en Afrique du Nord. La nouvelle dynastie laissera à l’écart les taïfas pendant un moment pour s’occuper des territoires maghrébins, mais en 1163, ils se lancent à leur tour à l’assaut d’Al-Andalus et font fusionner pour une seconde fois une partie de l'Afrique du Nord et d'al-Andalus. Les Almohades repousseront nombre d’attaques chrétiennes, ce qui va inquiéter ces derniers et les unifier. Une croisade est alors lancée contre l’Al-Andalus almohade. En 1212, les armées musulmanes subissent une grave défaite à la bataille de Las Navas de Tolosa : c’est le début de la fin de l’Espagne musulmane désormais réduite au royaume nasride de Grenade. La perte de cette bataille fait s’effondrer l’empire almohade, Al-Andalus se voit une nouvelle fois plongé dans la période des taïfas… Mais les choses ont changé, alors qu’auparavant les taïfas survivaient grâce à la position de force des musulmans, aujourd’hui c’est le contraire, les croisés percent enfin les défenses musulmanes et s’approprient leurs territoires. Et aussi surprenant que ce soit, c’est un État militairement faible, l'émirat de Grenade, qui survivra encore plus de deux siècles à la Reconquista. Cette résistance s’explique sûrement par la peste noire en Europe qui détourne l’attention des royaumes chrétiens, mais aussi par le fait que les Mérinides depuis les côtes d’Afrique du Nord soutiennent activement le petit royaume nasride.


L'Alhambra de Grenade, forteresse musulmane en Andalousie, région restée huit siècles sous la domination des dynasties musulmanes
En 1492, sept siècles après la conquête musulmane de la péninsule Ibérique, le dernier royaume musulman en Espagne, Grenade, est conquis par les rois catholiques.
Dès le début des succès de la Reconquista au xiie siècle, certains Andalous avaient commencé à se replier vers le Maroc ; mais la majorité d'entre eux a été contrainte de quitter l'Espagne principalement en deux temps : à la chute de Grenade en 1492, et en 1609 avec l'expulsion des Morisques.
L'exode de ce peuple, que le pays devra intégrer dans ses tissus sociaux et économiques, va marquer un nouveau tournant dans la culture, la philosophie, les arts, la politique de ce dernier. Notons que de nombreux intellectuels et artistes andalous rejoindront les cours royales.
Cependant leur arrivée sera plus délicate dans certaines villes du Royaume. Ils vont soit habiter dans d'anciennes cités, soit en construire de nouvelles ; néanmoins, les Andalous se sont principalement installés dans le nord du pays, comme à Tanger, Tétouan, Oujda, Chefchaouen, mais aussi à Rabat, Salé et Fès.
Les Moriscos installés à Rabat (dite Salé-le-Neuf) et Salé (aussi dite Salé-le-Vieil) formèrent une république corsaire vivant de courses commerciales fructueuses qui les emmenèrent à négocier avec de nombreux États (Espagne, Portugal, France, Angleterre, Hollande, Islande...) ; le succès de ces courses commerciales rentables créa des jalousies en Occident.

Wattassides (1471-1554)


Les Wattassides, Ouattassides ou Banû Watâs, sont une tribu de Berbères zénètes comme les Mérinides. Cette tribu, qui serait initialement originaire de l'actuelle Libye, était établie dans le Rif, au bord de la Méditerranée. De leur forteresse de Tazouta, entre Melilla et la Moulouya, les Beni Wattas ont peu à peu étendu leur puissance aux dépens de la famille régnante mérinide (voir l'article détaillé sur les Wattassides). Ces deux familles étant apparentées, les Mérinides ont recruté de nombreux vizirs chez les Wattassides. Les vizirs wattassides s'imposent peu à peu au pouvoir. Le dernier sultan mérinide est détrôné en 1465. Il s'en suit une période de confusion qui dure jusqu'en 1472. Le Maroc se trouve coupé en deux avec, au sud, une dynastie arabe émergente, les Saadiens, et au nord un sultanat wattasside déclinant.
En 1472, les sultans wattassides ont perdu tous leurs territoires stratégiques et n'ont plus le contrôle du détroit de Gibraltar. Les Portugais prennent possession de Tanger en 1471 puis cèdent la ville à l'Angleterre en 1661 comme dot apportée par Catherine de Bragance à son époux Charles II d'Angleterre. Durant la domination portugaise (1471-1661, avec un intermède espagnol entre 1580 et 1640), Tanger constitue la capitale de l'Algarve d'Afrique, car il existe alors deux Algarves, celle d'Europe et celle d'Afrique, toutes deux considérées comme territoires relevant personnellement de la dynastie d'Aviz puis de la dynastie de Bragance (le roi du Portugal porte aussi le titre de roi des Algarves). Durant la domination anglaise, Tanger est une place forte stratégique, dotée d'un statut spécial et élisant des représentants à la Chambre des communes à Londres, mais l'entretien d'une garnison militaire importante se relève trop coûteux aux yeux de l'opinion anglaise42. Cela pousse Charles II à faire évacuer la place, qui est prise par les troupes marocaines du sultan Moulay Ismail en 1684.
Sous les règnes successifs d'Alphonse V, Jean II et Manuel Ier (période marquant l'apogée de l'expansion portugaise) l'Algarve africaine englobe presque tout le littoral atlantique marocain, à l'exception de Rabat et de Salé. Les Portugais contrôlent la portion côtière s'étendant de Ceuta à Agadir et à Boujdour, avec pour points de jalon les places fortes de Tanger, Asilah, Larache, Azemmour, Mazagan, Safi et Castelo Real de Mogador. Ces possessions forment des fronteiras, équivalent portugais des presidios espagnols, et sont utilisées comme escales sur la route maritime du Brésil et de l'Inde portugaise. Néanmoins la plus grande partie du Maroc portugais est reconquise par les Saadiens en 1541. La dernière fronteira de la Couronne lusitane est Mazagan, récupérée par les Marocains en 1769. Les Espagnols pour leur part s'attribuent la côte méditerranéenne avec les présides de Melilla et le rocher de Vélez de la Gomera, ainsi que la région de Tarfaya faisant face aux îles Canaries. Ils prennent également le contrôle de Ceuta à l'issue de la débâcle portugaise à la Bataille des Trois Rois qui se solde par l'Union ibérique (1580)43.
De cette époque émerge la figure étonnante de Mustapha Zemmouri, plus connu sous le nom d'Estevanico (ou Esteban le Maure), Marocain natif d'Azemmour revendu par les Portugais comme esclave à Andrés Dorantes de Carranza, et qui s'illustre par son exploration de l'Amérique du Nord dans les rangs des conquistadors espagnols au début du XVIe siècle.
Les Wattassides affaiblis donnent finalement le pouvoir à une dynastie se réclamant d'une origine arabe chérifienne (les Saadiens) en 1554.

Dynastie des Mérinides


Contrairement aux deux dynasties précédentes, la montée en puissance des Mérinides n’est pas à mettre sur le compte d’une démarche personnelle associable à un individu mais plutôt à l’affirmation collective d’une tribu. L’autre rupture que marque l’accession au pouvoir des Mérinides est l’abandon du leitmotiv de la purification religieuse au profit d’une conception de la conquête du pouvoir plus classique, plus conforme à l’identité tribale des protagonistes.


La Medersa de Salé, construite par les Mérinides.
La tribu en question est une tribu zénète dont les origines sont issues des Wassin38. Toujours est-il que les Beni Merin (ou Bani Marin) constituent tout au long du xiie siècle l’archétype d’une tribu berbère lambda, nomadisant entre le bassin de la Haute-Moulouya à l’ouest (entre Guercif et Missour) et le Tell algérien, au sud de Sidi bel Abbès à l’est. La première occurrence de la tribu des Beni Merin dans l'historiographie marocaine coïncide avec leur participation en tant que groupe à la bataille d'Alarcos (1196), bataille finalement remportée par le camp almohade. C’est à cette occasion que s’illustre Abd al-Haqq considéré comme le véritable fondateur de la dynastie mérinide. De retour au pays, la tribu retombe dans un anonymat relatif jusqu’à la cinglante défaite almohade de Las Navas de Tolosa à l’issue de laquelle les troupes Mérinides iront défaire 10 000 soldats almohades. À la suite de ce succès, les Mérinides s’installent temporairement dans le Rif, soutenus par des Miknassas sédentarisés au nord de Taza. Dès 1216, ils se faisaient payer tribut par les cités de Fès et Taza. Les Almohades soucieux de restaurer leur autorité sur tout leur territoire lancent de nombreuses contre-offensives, le plus souvent vaines. C’est au cours d’une de ces manœuvres que décède Abd al-Haqq. Son fils Uthman ben Abd al-Haqq lui succède. Dès 1227, toutes les tribus entre le Bou Regreg et la Moulouya ont fait allégeance aux Mérinides. En 1240, Uthman ben Abd al-Haqq décède, assassiné par son esclave chrétien. C’est son frère Muhammad ben Abd al-Haqq qui lui succède, assiégeant avec un succès relatif Meknès. Il décède en 1244, tué par des milices chrétiennes au service des Almohades. Au milieu de la décennie 1240, les troupes Almohades sont mises en déroutes à Guercif. Les Mérinides s’engouffrent alors dans la très stratégique Trouée de Taza, tremplin qui leur permit d’entreprendre le siège de Fès en août 1248 et d’envisager la prise de toute la moitié nord du Maroc. Mais la moitié sud n’est pas en reste. Abu Yahya ben Abd al-Haqq ayant précédemment succédé joue des amitiés traditionnelles des Beni Merin avec les Béni-Ouaraïn du Moyen Atlas et d’autres tribus du Tafilalet pour contrôler les oasis et détourner les revenus du commerce transsaharien de Marrakech vers Fès, désignée comme capitale mérinide.
En 1258, Abu Yusuf Yaqub Ben Abd Al-Haqq succède à son frère enterré dans l’antique Nécropole de Chella qu’il avait commencé à réhabiliter39. Le début de son règne est marqué par une lutte avec son neveu qui réclamait la succession. Ce dernier parvient à prendre Salé. La situation à l’embouchure du Bou Regreg profite à la Castille qui prendra la cité en otage durant deux semaines. L’ouest du Rif fut également en proie à de nombreuses insurrections Ghomaras tandis que Ceuta et Tanger étaient alors aux mains d’un sultan indépendant, un dénommé El Asefi. Rapidement le nouveau souverain exprima son désir d’en découdre rapidement avec les Almohades retranchés dans le Haouz, l’est des Doukkala et une partie du Souss. Une première tentative en ce sens se solda par un échec en 1262. Les Almohades pressèrent alors les Abdalwadides d’attaquer leurs rivaux Mérinides par surprise. Yghomracen, célèbre souverain abdalwadide fut défait en 1268. L’année suivante, Marrakech fut définitivement prise40.


Medersa Bou Inania de Fès
Durant les années qui suivirent, il bouta les Espagnols hors de tous leurs établissements atlantiques jusqu’à Tanger. En 1276, Fès, nouvelle capitale du royaume se voit augmentée d’un nouveau quartier, à l’écart de l’ancienne ville, où se côtoient notamment le nouveau palais royal et le Mellah. C’est Fès El Jedid. Globalement la ville connaîtra sous l’ère mérinide un second âge d’or, après celui connu sous les Idrissides. Après la pacification totale du territoire et la prise de Sijilmassa aux Abdalwadides, le sultan franchit le détroit et tente de reconstituer la grande Andalousie musulmane des Almohades. Les entreprises espagnoles des Mérinides furent complexes mais n’accouchèrent que de peu de résultats concrets. À la suite du siège de Xérès, un traité de paix stipulant le retour de nombreux documents et ouvrages d’art andalous (tombés aux mains des chrétiens lors des prises de Séville et Cordoue) vers Fès. En 1286, Abu Yusuf Yaqub Ben Abd Al-Haqq décède à Algésiras. Il est inhumé à Chella. Son fils Abu Yaqub Yusuf39, plus tard dit an-nāsr, lui succède et se voit confronté dès son intronisation à un durcissement des révoltes dans le Drâa et à Marrakech et à un désaveu de certains membres de sa famille, s’alliant tantôt avec les Abdalwadides ou les révolté. Il rendit Cadix aux Nasrides de Grenade en guise de bonne volonté mais 6 ans plus tard, en 1291, ces derniers, alliés aux Castillans dont ils sont les vassaux, entreprennent de bouter définitivement les Mérinides de la Péninsule Ibérique. Après quatre mois de siège, Tarifa est prise par les Castillans. Mais les yeux d’Abu Yaqub Yusuf an-Nasr sont plutôt rivés sur Tlemcen, capitale des éternels rivaux des Beni Merin que sont les Abdalwadides. Il se dirige vers Tlemcen à la tête d’une armée cosmopolite puisqu’essentiellement composée de mercenaires chrétiens (Castillans et Aragonais principalement), de Turkmènes Oghouzes et de Kurdes. Le siège durera 8 ans et se poursuivra jusqu’à l’assassinat du souverain, des mains d’un des eunuques de son harem, en 1307.
Jusqu’à l’avènement d’Abu al-Hasan ben Uthman en 1331, la dynastie est marquée par une forme de décadence dont les principaux symptômes sont la multiplication :
Des querelles de succession
Des révoltes populaires (des difficultés dans le Rif, à Ceuta et Tanger se surajoutèrent au climat insurrectionnel croisant à Marrakech et dans le Souss)
Des révoltes militaires (c’est la première fois dans l’histoire du Maroc que les généraux de l’armée royale auront leur mot à dire dans la gestion des affaires royales).
En 1331 donc, Abu al-Hasan ben Uthman succède à son père, quelques mois seulement après avoir obtenu son pardon. Rapidement, l’obsession de ses aînés pour Tlemcen le rattrape. Il entame un nouveau siège sur la ville qui s’avèrera vain. Il évince ceux qui dans son entourage familial le jalousent mais sait faire preuve d’une grande dextérité dans sa gestion des ambitions tribales. Tlemcen tombe enfin en 1337. Abu al-Hasan ben Uthman est auréolé de gloire. Cette victoire lui ouvre la voie du Maghreb médian mais avant de s’engouffrer dans cette brèche ouverte en direction d’Ifriqiya, le souverain tient à venger la mort de son fils Abu Malik, surpris par les Castillans après son succès à Gibraltar en 1333. La bataille de Tarifa, le 30 octobre 1340 se solde par une lourde défaite qui signera la fin définitive des ambitions marocaines en terre espagnole. Sept années plus tard, le sultan et ses armées parviennent à soumettre l’Ifriqiya. L’année suivante pourtant, les Mérinides essuient une cuisante défaite à Kairouan. L’écho de la déconvenue est grand, au point que nait et se répand une folle rumeur selon laquelle Abu l’Hassan serait mort au combat. À Tlemcen, Abu Inan Faris est alors intronisé. C’est de sa volonté qu’émanera la construction de la medersa Bou Inania de Fès. Il a d’ailleurs également parachevé la construction de la Medersa Bou Inania de Meknès, entamé par son aîné. Ce dernier tentera un vain retour via Alger puis Sijilmassa. Il est finalement défait et tué par les armées de son fils sur les rives de Oum Errabiaa. Abu Inan Faris, profondément chagriné par ce décès, tentera alors de faire asseoir son autorité sur l’ensemble du royaume, de nouveau fragilisé par la recrudescence des volontés insurrectionnelles. Il s’entoure à ces fins d’Ibn Khaldoun, penseur de génie et véritable précurseur de la sociologie moderne. Son neveu, maître de Fès, est exécuté, mais à l’occasion de ce déplacement au Maroc, c’est Tlemcen qui se soulève. Une intense campagne permet un certain regain de vigueur des Mérinides mais Abu Inan est étranglé des mains d’un de ses vizirs, un certain al-Foudoudi, le 3 décembre 1358, neuf ans seulement après son accession au pouvoir.


Mansourah, ancien fief mérinide lors du siège de Tlemcen en Algérie
L’anarchie est alors à son paroxysme. C’est le premier grand déclin de la dynastie. Chaque vizir tente de porter sur le trône le prétendant le plus faible et manipulable. Les richesses patiemment accumulées par les souverains précédents sont pillées. Un premier prétendant venu de Castille parvient à se soustraire pour un temps à ce diktat des vizirs. Il s’appelle Abû Ziyân Muhammad ben Ya`qûb plus simplement appelé Muhammad ben Yaqub. Reconnu et acclamé dans le nord du Maroc, il règne à partir de 1362 sur un royaume dont seule la moitié nord (de la Tadla aux contreforts méridionaux du Rif) est demeurée loyale à l’autorité mérinide. Tout au long de son bref règne, il tentera de faire évincer un à un les vizirs jugés encombrants mais c’est des mains d’un de ces derniers, le grand vizir Omar, qu’il périra en 1366. Omar désincarcère alors le fils d’Abu l’Hasan, Abu Faris Abd al-Aziz ben Ali ou plus simplement Abd al Aziz. Après avoir réussi le tour de force d’évincer bon nombre de vizirs dont celui qui l’a porté au pouvoir, il parvient à mater le pouvoir parallèle en place à Marrakech (pouvoir dit d’Abou l'Fadel, vaincu en 1368). Il parvient à asseoir son autorité en pays Hintata, puis dans le Souss et à Sijilmassa. En 1370, Tlemcen, où s’était reconstitué le pouvoir abdalwadide, retombe aux mains des Mérinides. Mais deux ans plus tard seulement, il s’éteint. Le royaume est à nouveau scindé en deux, les zaouïas prenant le pouvoir à Marrakech. La peste noire se fait dévastatrice.
S’ensuivent 21 années de déclin durant lesquelles se multiplient les intrigues dynastiques, les coups politiques des différents vizirs, les ingérences nasrides et de vaines tentatives de coups d’éclat militaires face à Tlemcen. Durant les deux périodes de déclin, la pratique de la course se développe, tant dans le nord, dans les environs de Tanger et Ceuta, que sur la côte atlantique.
En 1399, alors que le Maroc est en proie à une anarchie des plus totales, le roi Henri III de Castille arme une expédition navale destinée à annihiler la pratique de la course depuis Tétouan. En fait, la ville est non seulement mise à sac mais également totalement vidée de sa population (la moitié est déportée en Castille). En 1415, c’est au tour de Ceuta de tomber aux mains des navires de Jean Ier, roi du Portugal, lui aussi en croisade contre la course.
La dynastie mérinide connait un tragique déclin41. Abu Said Uthman ben Ahmad dit Abu Said succède à Abu Amir Abd Allah dans des circonstances troubles. Prince taciturne, il se tourne à nouveau vers Tlemcen. Mais le vent a tourné et Abou Malek, souverain abdalwadide, pétri de haine à l’encontre des maîtres de Fès, parvient à prendre la ville et impose un souverain fantoche. Les documents concernant cette période sont très flous et se contredisent. Toujours est-il que Abu Muhammad Abd al-Haqq succède à Abu Said alors qu’il n’a qu’un an (1421). Cette accession au trône appela bien sûr une régence. Les vizirs wattassides s’avèreront incontournables.

Au cours des croisades

Le califat almohade, sous le règne d'Abu Yusuf Yaqub al-Mansur, établit un partenariat stratégique avec l'Égypte du sultan Saladin. Le point d'orgue de cette relation est l'ambassade d'Abou al Harith Abderrahman Ibn Moukid envoyé par Saladin auprès de la cour de Marrakech. Cette mission se concrétise par la participation de la flotte marocaine aux opérations maritimes contre les Croisés (sur les côtes du Proche-Orient et en mer Rouge). Lors de la prise de Jérusalem par Saladin en 1187, l'établissement de Marocains y a augmenté36. Ils établirent ainsi un quartier qui porte le nom de « Quartiers des Marocains », détruit en 1967 ; des Palestiniens descendent de ces Marocains installés en Terre sainte36.

Dynastie almoravide


Mohammad Ibn Toumert, futur Mahdi et fils d'un amghar, chef de village de la tribu des Harga, dans le Haut Atlas. Très précocement animé par un zèle religieux, il entreprit dès sa jeunesse de multiples voyages l’amenant à visiter Baghdad, Le Caire et peut-être même Damas où il découvre tout l'ampleur de la tradition musulmane, et notamment le soufisme. Rapidement, il entretient une profonde aversion pour l'étroitesse du malékisme régnant en maître en sa patrie. C'est en 1117 qu'il regagne le Maghreb, via Tripoli, puis Tunis et enfin Béjaïa où ses prêches pieuses galvanisent les foules. À Melalla, il se lie d’amitié avec le Zénète Abd El Moumen. C'est en compagnie de ce dernier qu'Ibn Toumert d'Almohades (d'« Al-Muwahidûn », الموحدون), les Unitaires. C'est à Tinmel, au cœur de la très isolée vallée du N'fis, qu’il établit sa « capitale ». Ses prêches rencontrent un écho considérable et il clame ouvertement son intention de liguer toutes les tribus insoumises des montagnes contre les Almoravides. Son aura grandissante suscite de jour en jour davantage d'inquiétudes de la part des Almoravides qui lancent contre lui en 1121 une expédition militaire commandée par le gouverneur du Souss, Abou Bakr Ben Mohammed El-Lamtouni. L'expédition est littéralement écrasée. À la suite de cette déconvenue, ses désirs s'estompèrent un temps mais en 1127 (ou 1129), une nouvelle expédition parvint dans les contreforts du Haut-Atlas aux environs d’Aghmat dans l'espoir de frapper un grand coup en pays Hintata, fief de la doctrine « Unitaire ». Mais Abd El Moumen et El Béchir contrarièrent ce plan et profitant de l'effet de surprise, ils parvinrent même à assiéger ponctuellement Marrakech, capitale almoravide. Cependant, leurs faiblesses en combat de plaine les poussèrent à se retrancher en toute hâte (El Béchir mourut). Quelques mois plus tard, en septembre 1130, Ibn Toumert mourut.


Intérieur de la mosquée de Tinmel, fief originel de la doctrine almohade
Abd El Moumen succéda d'abord secrètement au fondateur de la secte et privilégia une politique d'alliance avec les tribus de l'Atlas. Pour ce faire, il joua non seulement de ses origines zénètes mais aussi de ce qui restait de cercles d'initiés qu'avait fondé son prédécesseur. Dès 1140, une intense campagne permet aux Almohades de s'attirer les faveurs des oasis du sud. Taza puis Tétouan sont les premières grandes cités à tomber. À la faveur du décès d’Ali Ben Youssef en 1143, il s'empare de Melilla et d'Al-Hoceima, faisant ainsi du nord du Maroc sa véritable base logistique. La mort du redoutable Reverter en 1145 suivie la même année de celle de Tachfin Ben Ali permet aux Almohades les prises respectives d’Oran, de Tlemcen, d'Oujda et de Guercif. S'ensuit ensuite le long et éprouvant siège de Fès qui durera la bagatelle de neuf mois durant lesquels Abd El Moumen se charge personnellement de prendre Meknès, Salé et Sebta. La conquête du Maroc s'achèvera finalement en mars 1147 par la prise de Marrakech, capitale du désormais déchu empire almoravide et dont le dernier roi Ishaq Ben Ali sera ce jour-là impitoyablement tué. Pour fêter cette victoire, Abd El Moumen fit bâtir la très célèbre Koutoubia sur les ruines de l'ancien Dar El Hajar.



Kasbah des Oudaïas de Rabat construite par les Almohades
De manière assez inédite, les premiers efforts militaires d'Abd El Moumen désormais « intronisé » se tournent vers l'est du Maghreb, sous la menace des Normands de Sicile menés par Roger II (qui ont pris le contrôle de Djerba et Mahdia et menacent la prospère Bejaïa) et des cohortes bédouines envoyées depuis Le Caire par les souverains Fatimides, furieux de voir Zirides et Hammadides échapper à leur contrôle. Les opérations lancées s'avèrent largement fructueuses puisque les bédouins sont complètement écrasés à Béjaïa puis Sétif en 1152. En 1159, une puissante armée terrestre est levée depuis Salé, secondée par une flotte de soixante-dix navires, obligeant les Normands à se retrancher sur Sfax et Tripoli. Ainsi l'empire Almohade s'étendait-il à la fin des années 1150 de l'Océan Atlantique jusqu'aux portes de la Libye. En Andalousie la fin de la période almoravide a permis la résurgence des reinos de taifas et un regain de vigueur des Chrétiens. En 1144 ils prennent même le contrôle de Cordoue. À l'ouest, Lisbonne et Santarem sont prises également. Almeria est également prise par les Aragonais pour une décennie entière. Dos au mur, les taifas se voient obligés de faire de nouvel appel aux maîtres du Maghreb. Ainsi, avant même la prise de Marrakech par les Almohades, Jerez et Cadix s'offrent à ces derniers. Dans le sillage de la prise de Marrakech, des corps expéditionnaires permettent la conquête de tout le sud de la péninsule (Grenade, Séville, Cordoue ...) puis de Badajoz. En 1157, Almeria est reprise. Abd El Moumen décèdera finalement en 1163 à Salé. Son fils Abu Yaqub Yusuf lui succède, d'abord reconnu à Séville puis à Marrakech. Il s'efforcera jusqu'à son décès en 1184 de régner en véritable « despote éclairé », soucieux de desserrer l'étau d'orthodoxie religieuse pesant sur le Maghreb. Sous son impulsion fleurissent des arts autrement plus épanouis que sous la dynastie précédente. L’architecture en particulier atteint un véritable âge d’or, se traduisant par la construction de la Giralda à Séville, fraichement honorée du statut de capitale andalouse, ainsi que de la Tour Hassan à Rabat (dont le minaret ne fut jamais achevé) et de la Koutoubia à Marrakech, toutes trois bâties sur un modèle sensiblement équivalent. Dans d’autres registres, le palais de l’Alhambra est érigé sur les hauteurs de Grenade et les Jardins de l'Agdal sont plantés à Marrakech (cf. l'article Art almoravide et almohade). C’est également sous les Almohades que vécut le brillant philosophe Averroès (de son vrai nom Ibn Rûshd ابن رشد) ainsi que Maïmonide qui ira néanmoins s’exiler au Caire afin de pouvoir pratiquer librement sa religion (il était de confession hébraïque). À la mort d’Abu Yaqub Yusuf, les Almoravides demeurés maîtres des Baléares s’en vont porter le glaive là où jadis sévissaient les Normands. Ils arrachent Alger, Miliana, Gafsa et Tripoli aux Almohades et subventionnent des tribus bédouines d’Ifriqiya qui s’en iront mener des razzias dans tout le Maghreb médian et descendront même jusque dans les oasis du Drâa. Matées par les vigilantes milices d’un certain gouverneur Abu Yusf, ces tribus bédouines seront par la suite sédentarisées dans l’ouest marocain, dans l’ancien pays bergouata où elles contribueront à l’effort d’arabisation des plaines du Gharb et de la Chaouia. Après la victoire d’Alarcos durant laquelle Alphonse VIII est battu par le souverain Abu Yusuf Yaqub al-Mansur, les derniers fauteurs de troubles Almoravides sont écrasés dans le sud tunisien. C’est l’âge d’or almohade.


Tour Hassan construite par le sultan almohade Yacoub El Mansour à Rabat
Muhammad an-Nasir succède à son père en 1199. Le 16 juillet 1212, son armée de 200 000 hommes est mise en déroute par une coalition de près de 220 000 chrétiens venus de France, d’Aragon et de Catalogne, de León et de Castille. C’est la Bataille de Las Navas de Tolosa que l’histoire retiendra comme l’évènement charnière de la Reconquista. L’autorité des Almohades sur leur empire sera durablement affaiblie par cette débâcle, au point que le Muhammad an-Nasir renoncera à son trône l’année suivante, le cédant à son fils. À 16 ans, Yusuf al-Mustansir accède donc au trône. Dépourvu d’autorité, il voit rapidement le Maghreb médian lui échapper. Il en va de même en Andalousie où le gouverneur almohade de Murcie réclame une régence et franchit le détroit pour le faire savoir. À Séville, Al-Mamoun fait sensiblement de même. Les taïfas renaissent de leurs cendres et imposent le malékisme. À Marrakech même les cheikhs souhaitent procéder à l’élection d’un nouveau calife, ne laissant d’autre choix au jeune souverain que la fuite pour un temps. Son fils, Abd al-Wahid al-Makhlu lui succède en 1223. Il mourra étranglé l’année même. Les cheikhs de Marrakech procèderont alors à l’élection d’Abu Muhammad al-Adil. Les Hafsides, du nom d’Abû Muhammad ben ach-Chaykh Abî Hafs, autrefois vizir de Muhammad an-Nasir déclarent leur indépendance en 1226, sous l’impulsion de Abû Zakariyâ Yahyâ. La mort d’Abu Muhammad al-Adil marquera le début de l’ingérence du Royaume de Castille dans les affaires marocaines. Ferdinand III de Castille soutiendra Abu al-Ala Idris al-Mamun tandis que les cheikhs soutiendront le fils de Muhammad an-Nasir, Yahya al-Mutasim. C’est le premier qui prit pour un temps l’ascendant, parvenant à prendre Marrakech et à massacrer les cheikhs. Il renia la doctrine religieuse almohade au profit du malékisme et consentit en paiement de sa dette à construire l’église Notre-Dame de Marrakech en 1230. L’édifice fut détruit deux ans plus tard. En 1233, son fils Abd al-Wahid ar-Rachid reprit Marrakech et chassa de Fès les Bani Mari futurs Mérinides (ces derniers faisaient payer à la ville et à sa voisine Taza un tribut depuis 1216), permettant de réunifier le Maroc. En Andalousie, Cordoue tombe aux mains de Ferdinand III de Castille dès 1236. Valence lui emboitera le pas deux ans plus tard, puis ce sera au tour de Séville en 1248. Entre temps, Abu al-Hasan as-Said al-Mutadid parviendra à rétablir un semblant d’unité sur le Maroc mais accumulera les échecs face aux Mérinides dont l’avancée est irrésistible sur le Maroc septentrional. Pour une trentaine d’année, les Almohades survivront, recroquevillés sur la plaine du Haouz et payant un tribut à leurs voisins septentrionaux. En 1269, Marrakech tombe. En 1276, c’est au tour de Tinmel. Un siècle et demi plus tard, la boucle almohade est bouclée.

Dynastie almoravide


Alors que le « Maroc utile » est en proie aux convoitises des entités politiques voisines ainsi qu'aux déchirements internes, trois grandes tribus berbères se partagent les régions sahariennes. Les Lemtouna, Massoufa et Goddala (ou Gadala, lointains descendants des antiques Gétules), tous trois membres de la confédération Sanhaja et islamisés deux siècles et demi plus tôt, guerroient et vagabondent régulièrement en direction du sud où ils menacent l'empire du Ghana et d'autres états soudanais. De la tribu Lemtouna, l'émir Yahya Ibn Ibrahim se rend vers 1035 accomplir le pèlerinage à La Mecque. Là bas, il prend conscience de la nécessité de parfaire l'islam de ses congénères des régions de l'Adrar. En halte à Kairouan, il tente pour cela d'obtenir un appui logistique de la part d'éminences religieuses locales, mais sans résultat. Ce sera dans la région de Taroudant qu'un dénommé Ou Agg ben Zellou lui indiqua l'existence d'un prédicateur dans le désert, un certain Abdallah Ibn Yasin originaire du sud marocain. Yahya Ibn Ibrahim et Abdallah Ibn Yasin s'en retournèrent donc tous deux dans l'Adrar convertir les Djoudala (tribu des Lemtouna) au malékisme puritain. Si au départ leurs enseignements sont plutôt bien accueillis, leur austérité et leurs méthodes radicales (instruments de musique et habits de couleurs vives bannis) finirent par lasser. Yahya Ibn Ibrahim et Abdallah Ibn Yasin errèrent donc dans le désert et s'en allèrent donc fonder un ribat sur l'île de Tidra entre la baie du Lévrier et le cap Timiris. Là ils conceptualisèrent une véritable doctrine qui leur valut le nom d'Almoravides (de Al-murabitun, المرابطون), les gens du ribat."Empire almoravide"
Le climat d'exaltation mystique qui régnait au couvent militaire attira de nombreux fidèles de toutes les contrées du Sahara occidental et même au-delà. De 1042 à 1052, les Almoravides conquièrent tout l'ouest du Sahara et tournent leurs regard vers le nord. Yahya Ibn Ibrahim fut tué et remplacé par Abu Bakr Ibn Omar. Dès lors l'expansion des Almoravides est irrésistible. Aoudaghost, place forte de l'empire du Ghana et importante étape du commerce transaharien est prise et détruite. L'année suivante, c'est au tour de Sijilmassa de céder à la pression almoravide et de voir ses maîtres Zénètes impitoyablement exterminés. La même année (1056), Taroudant et le Souss entier se rendent aux envahisseurs. Les Almoravides n'ont alors qu'une idée : soumettre les plaines fertiles du Maroc utile et les intrépides tribus de l'Atlas. Néanmoins, les combats contre les hérétiques Berghouata s'éternisent et s'avèrent plus ardus que prévu. Yahya Ibn Ibrahim est même mortellement blessé et inhumé sur un des affluents du Bou Regreg. Abou Bakr doit alors se rendre à nouveau dans le désert pour mettre fin à des luttes intestines et il confie alors le commandement des terres septentrionales nouvellement conquises à son cousin, un certain Youssef Ibn Tachfin. En 1072, ce dernier empêche le retour d'Abou Bakr et fait dès lors de Marrakech, fondée deux ans plus tôt, sa capitale. La rigueur morale de ces « Voilés » et leur attachement aux valeurs de l'islam attira les nombreux déçus des années du climat d'anarchie ambiant et Youssef Ibn Tachfin constitua sans mal une armée de 20 000 hommes qu'il arma d'arbalètes. Toutefois, la soumission des intrépides tribus Zénètes ne fut pas des plus aisées. Ces derniers se rallièrent même ponctuellement aux élites bourgeoises de Fès et de Tétouan, bien décidées à repousser ces tribus dont le puritanisme était aux antipodes des aspirations de raffinement et de luxe qu'ils avaient importé d'Andalousie. Des villes du nord, Meknès tomba la première, puis ce fut au tour de Fès (1060 ou 1061), des villes du Rif, de Tlemcen (1069) et enfin d'Oujda (1081). Tanger et Ceuta, fiefs de la dynastie hammudite de Malaga ne cédèrent que vers 1084 après un éprouvant siège et subirent de terribles supplices. À l'est, les Almoravides avancèrent jusqu'à Alger (Ténès et Oran furent gagnées en 1082).


Tombeau du célèbre prince et poète Al Mutamid Ibn Abbad, condamné à finir sa vie dans une prison d'Aghmat au sud de Marrakech
Alors que dans la brillante Andalousie, les princes musulmans subissaient les premiers revers face aux chrétiens ligués autour de la personne d'Alphonse VI, les extraordinaires prouesses militaires de ces « Voilés » aux mœurs rigides résonnent comme une bénédiction. Al-Muttawakil de la Taifa de Badajoz fait appel aux Almoravides dès 1079. En 1082, c'est au tour d'Al Mutamid Ibn Abbad de solliciter les maîtres du Maroc. En 1086, pour répondre à ces appels et pour enrayer la « décadence » de la civilisation d'Al-andalus (arts florissants, consommation de vin...), Youssef Ibn Tachfin fait embarquer de Ceuta la bagatelle de 7000 cavaliers et 12 000 fantassins. Rapidement, les rois des différentes taifas rallient les armées Almoravides. Les victoires s'enchainent et les armées d'Alphonse VI sont mises en déroutes non loin de Badajoz le 23 octobre 1086. Youssef Ibn Tachfin rentre au Maroc régler des affaires internes mais le désordre en Andalousie le pousse à revenir. Il est néanmoins poussé par les fakihs à revenir, du fait des difficultés lors du siège à Aledo et surtout des divisions entre taifas qu'il considérait personnellement comme une honte pour l'islam. En 1090, un concile almoravide à Algésiras déclara la guerre aux reyes de taifas accusés d'impiété. L'alliance de certains de ces derniers avec des princes chrétiens n'empêcha pourtant pas l'irrésistible avancée des Almoravides à Al-andalus, qui s'acheva en 1094 avec la prise de Badajoz et l'impitoyable mise à mort d'Al-Mutawakil et de sa famille. Les victoires s'enchainent encore face au Cid retranché à Valence.
En 1106, après la prise de Valence et alors que les Baléares sont occupées, Youssef Ibn Tachfin décède et son fils, Ali Ben Youssef hérite du trône. Fils d'une esclave chrétienne affranchie, il devient par la même occasion maître d'un empire s'étendant du Tage au fleuve Sénégal, des côtes algériennes à Tombouctou. Il nomme son frère Temyn gouverneur d'Al-andalus. Les armées almoravides défont Sancho, fils d'Alphonse VI lors du siège du château d'Uclès. Alphonse VI décèdera l'année suivante, en 1109. Ali revient alors en Andalousie et remporte les sièges de Madrid, Guadalajara et Talavera. À l'ouest, les armées almoravides poussent jusqu'à Porto, menaçant même les côtes galiciennes. À l'est, les Baléares servent de base logistique aux razzias menées contre Barcelone. Cependant, les innombrables exploits militaires ne parviennent pas à pallier le mécontentement ambiant en Andalousie où le fragile équilibre entre Mozarabes, juifs et Arabes est quelque peu rompu par la rigueur religieuse imposée par les conquérants. L'autodafé des écrits du très populaire Al-Ghazali ne fait qu'amplifier le malaise des élites culturelles, nostalgiques de l'âge d'or du califat omeyyade. La sollicitation par l'armée divine des milices chrétiennes de Reverter pour maintenir l'ordre au Maroc même est mal comprise par les tribus montagnardes du Haut-Atlas, de jour en jour plus mécontentes de l'autoritarisme almoravide.

Ifrenides

Régnant sur la région de Tlemcen dès le xe siècle, les Ifrenides, ou Banou Ifren, occuperont presque la totalité du Maroc actuel aux côtés des Maghraouas, vassaux des Omeyyades de Cordoue, et ce jusqu'à l'arrivée des Hilaliens et des Almoravides. Au xie siècle, les Banou Ifren conquièrent le territoire des Berghwata33. Ils restent maitres des régions qu'ils ont conquises et des villes qu'ils ont fondées et exerceront périodiquement le pouvoir à Fès34. Vaincus par les Almoravides dès 1057, ils perdent tout pouvoir pendant le règne de ces derniers. Ce n'est qu’à la chute des Almoravides que les Ifrenides reprendront le contrôle de la région de Tlemcen, mais ils seront de nouveau vaincus par les Almohades et leur territoire conquis par ces derniers. Vers 1437, les Banou Ifren chasseront les Mérinides du Maghreb central et établiront de nouveau leur pouvoir à Tlemcen35.

Meknassa et Maghraoua


Le pouvoir meknassien s'appuie sur son ribat de Taza. Il doit sa puissance presque légendaire à Moussa Ben Abi Elafia Ben Abi Bassil qui parvient à conquérir Fès, Taza, Tanger et Larache en 924, avant de s'emparer, par la suite, d'une part importante des régions marocaines à la suite des allégeances des diverses tribus. Il chasse les Idrissides de leurs positions. Ces derniers se retranchent dans la forteresse de Hisn Hajar Annasr26,32. En 932, ils s'emparent de Tlemcen puis de Tekkour (Haute Moulouya) et sa région. Ils s'allient au calife omeyyade de Cordoue Abd al-Rahman III, mais sont défaits par les Fatimides. En conséquence ils se replient à Guercif, Tekkour et Taza.
On attribue aux Meknassa la construction des forteresses de Taza et de Meknès, ainsi que de la ville de Tsoul (détruite plus tard par les Almoravides).
Vers 954, Selon Ibn Khaldoun, les Zénètes s'emparent de plusieurs villes au Maghreb el Aqsa, comme Fès, Oujda, Salé, Sijilmassa en profitant de l'éclipse politique des Idrissides. Pendant la conquête, les Maghraouas, les Banou Ifrens et les Meknassa ont des points de vue divergents, ce qui provoque une instabilité dans la région.
Les Fatimides désormais installés au Caire profitent de ces divisions entre les trois tribus zénètes et envoient les Zirides de l'Ifriqiya pour conquérir le Maghreb el Aqsa. Le Ziride Ziri ibn Menad réussit à conquérir une partie du Maroc actuel. En 971, son fils Bologhine ibn Ziri affirme sa souveraineté sur la majorité des villes importantes.
Durant cette période, les Berghouata (confédération de tribus Masmoudas et Sanhadja pratiquant une religion particulière, devenue distincte de l'islam) sont donc attaqués par les Zirides. Les Maghraoua demandent donc l'aide des Omeyyades. Bologhine ibn Ziri est contraint de reculer devant l'armée omeyyade venue d'Andalousie par voie maritime, et qui débarque à Ceuta27. Par la suite, Ziri Ibn Attia entre en conflit avec les chefs des Banou Ifrens et des Meknassa. Une lutte au pouvoir acharnée éclate entre les fractions zénètes. Les Banou Ifren attaquent les Berghouata et prennent plusieurs fois Fès aux Maghraouas. Ces derniers rétablissent l'équilibre du Maghreb el Aqsa27. Ces périodes d'instabilité ne permettent à aucune de ces trois tribus de constituer une dynastie durable.

Incursions d'autres tribus zénètes


Vers 954 et selon Ibn Khaldoun, trois grandes confédérations tribales zénètes26 s'emparent de plusieurs villes et régions du Maghreb el Aksa (appellation arabe du Maroc), à savoir Fès, Oujda (fondée en 994 par le Maghraoui Ziri Ibn Attia), Salé (fondée au cours du xe siècle par les Banou Ifrens, Sijilmassa), ou encore les régions du Souss et du Haouz, et ce consécutivement à l'affaiblissement de la dynastie arabe chérifienne des Idrissides.
Pendant la conquête, les points de vue des Maghraouas, Banou Ifrens et Meknassas divergèrent provoquant une instabilité sur l'ensemble du territoire. Les diverses tribus maghraouas étaient tantôt alliées aux Omeyyades tantôt aux Fatimides. Les Banou Ifrens demeurèrent réfractaires à toute alliance avec les puissances arabes.
Les Fatimides profitent de ces divisions entre les 3 tribus zénètes et envoient les Zirides de l'Ifriqiya pour conquérir le Maghreb el Aksa (le Maroc actuel). Le Ziride nommé Ziri ibn Menad réussit à conquérir une partie du Maroc actuel. En 971, son fils Bologhine ibn Ziri affirme sa souveraineté sur la majorité des villes importantes. Durant cette période, les Berghouatas (confédération tribale masmouda et sanhadja) seront donc attaqués par les Zirides. Les Maghraouas demandent l'aide des Omeyades. Ces derniers acceptent enfin d'aider les Zénètes à reconquérir les territoires, en particulier ceux des Maghraouas de l'ouest du Maghreb. Bologhine ibn Ziri est contraint de reculer devant l'armée omeyade venue d'Andalousie par voie maritime et qui s'installe à Ceuta27. Par la suite, Ziri Ibn Attia des Maghraouas entre en conflit avec les chefs des Banou Ifrens et des Meknassas. Une lutte au pouvoir sera acharnée entre les fractions zénètes. Les Banou Ifrens attaquent les Berghouata et prennent plusieurs fois Fès, place forte maghraoua. Ces derniers rétabliront finalement l'équilibre du Maghreb el Aksa27. Le règne des 3 tribus zénètes s'achèvera par l'arrivée des Hilaliens et des Almoravides vers le XIe siècle en 1059. Les Zénètes seront évincés par les Almoravides du Maghreb el Aksa28. De tout temps, les Zénètes étaient seuls maîtres des routes et du commerce dans la région. Cette période est caractérisée par une certaine prépondérance des pratiques démocratiques tribales, comme ce fut déjà le cas deux siècles auparavant lors des révoltes kharijites29. Les Zénètes ont démontré par leur histoire qu'ils pouvaient négocier avec toutes les tribus au Maghreb. Plusieurs alliances et traités ont été élaborés pendant cette période. La construction s'est développée et plusieurs villes ont connu un véritable essor (construction de mosquée30, de kalaâ, ksours, etc). En 1068, les trois « dynasties » chutent tant à cause du zèle manifeste de certains chefs que du fait de leur détermination à se lancer dans des guerres saintes31.

Dynastie idrisside (789-985)


L'histoire des Idrissides commence lorsqu'un prince arabe chiite de la famille de `Ali (quatrième calife de l'islam) et son affranchi Rachid Ben Morched El Koreichi se réfugient dans le Moyen Atlas. Fuyant la menace des Abbassides (qui avaient massacré des Alides et leurs partisans chiites lors de la bataille de Fakh près de la Mecque), ils séjournent en Égypte avant de s'installer à Walilah (Volubilis), sous la protection de la tribu berbère des Awarbas. Réussissant à rallier les tribus à sa cause, Idriss est investi imam et fonde la ville de Fès en 789 sous le nom d'Idriss Ier. C'est le début de la dynastie des Idrissides.
Idris Ier est assassiné par un émissaire du calife abbasside Haroun al-Rachid, un certain Sulayman al Zindhi. Ne se doutant point que la femme d'Idris Ier (Kenza) est enceinte, le maître de Bagdad pense que la menace est vaincue. Mais quelques mois plus tard, Idris II naît. Son éducation a été confiée à l'affranchi de son père Rachid. Onze années plus tard, il est proclamé imam. Au fil des années, sa sagesse et son sens pour la politique s'affirment, il réussit à fédérer plus de tribus, le nombre de ses fidèles s'accroît et la puissance de son armée (dans laquelle s'engagent notamment des Kaisites issus des tribus du nord de la péninsule arabique) se développe. Le royaume idrisside englobe ainsi toute la portion de territoire s'étendant de Tlemcen à l'est jusqu'au Souss au sud. Il semble que la dynastie idrisside, du moins à ses débuts, ait professé le chiisme et plus précisément le zaïdisme, réputé être le plus modéré des rites chiites23.
Se sentant à l'étroit à Walilah, Idriss II quitte l'antique cité romaine pour Fès, où il fonde le quartier des Kairouanais sur la rive gauche (Idris Ier s'était établi sur la rive droite, le quartier des Andalous). Les Kairouanais sont issus de puissantes familles arabes et arabo-perses (du Khorassan) établies en Ifriqya depuis l'époque abbasside. Elles sont expulsées de Kairouan en raison des persécutions politiques infligées par les Aghlabides. Les Andalous qui s'installent à Fès sont quant à eux des opposants aux Omeyyades, originaires des faubourgs cordouans (notamment du faubourg du Rabad, d'où le nom de Rabadis attribué aux éléments de cette première vague d'immigration en provenance d'Al-Andalus)24. Le royaume idrisside connaît de manière générale une importante phase d'urbanisation, illustrée par la création de villes nouvelles comme Salé, Wazzequr et Basra, inspirée de la Bassorah d'Irak. Ces cités sont des foyers de diffusion de culture arabe et des vecteurs d'islamisation. À cette même époque, les Vikings venus de la lointaine Scandinavie et dirigés par le redoutable chef Hasting se signalent par leurs incursions dévastatrices sur les côtes nord du Maroc (notamment dans les régions d'Asilah et de Nador).
En 985, les Idrissides perdent tout pouvoir politique au Maroc et sont massivement exilés en Al-Andalus. Installés à Malaga, ils récupèrent peu à peu leur puissance, au point d'engendrer une dynastie pendant l'époque des taifas, les Hammudites. Ces derniers prétendront même au califat à Cordoue en lieu et place des Omeyyades en 101625.

Royaume des Berghouata (entre les viiie et xe siècles)

Les Barghawata (ou encore Barghwata ou Berghouata) forment un émirat berbère, appartenant au groupe de l'ethnie des Masmoudas. Après que les kharijites ont échoué dans leur rébellion au Maroc contre les califes de Damas, ils établissent (744 – 1058) un royaume dans la région de Tamesna sur les côtes de l’Atlantique entre Safi et Salé sous l’égide de Tarif al-Matghari21. La particularité de cet État est de créer une religion purement berbère, s'appuyant sur un livre saint inspiré du Coran, et dirigé par un gouvernement théocratique fixant les rituels d'un nouveau culte empruntant à la fois à l'islam, au judaïsme et aux antiques croyances locales. Les Barghwata maintiennent leur suprématie dans la région des plaines atlantiques durant quatre siècles, et entretiennent des relations diplomatiques et commerciales avec le califat omeyyade de Cordoue qui voit probablement en eux des alliés potentiels contre les Fatimides et leurs alliés zénètes. Il semble que sur les 29 tribus constitutives de ce royaume, douze aient adopté réellement la religion barghwata, les dix-sept autres étant restées fidèles au kharijisme22,2

De la conquête arabe aux troubles anarchiques


En 649, débute la conquête du Maghreb par les troupes arabes. C'est 35 ans plus tard que ces troupes pénètrent véritablement dans le territoire marocain. Les tribus berbères installées aussi bien dans les contreforts montagneux de l'Atlas et du Rif que dans les fertiles plaines atlantiques soutiendront dans un premier temps les Byzantins installés sur les côtes méditerranéennes qu'ils préféreront aux Arabes notamment à cause d'erreurs diplomatiques. La destruction des installations byzantines aux alentours de l'an 700 aura finalement raison de la résistance berbère qui se convertira dès lors à l'islam apporté par les conquérants arabes. Les berbères du Maroc étaient alors très faiblement christianisés tandis que les populations juives ne se convertirent que très faiblement à l'islam. Par ailleurs, l'islam ne sera dès lors plus jamais contesté au Maroc, contrairement à ce qui a pu se passer en Algérie ou en Tunisie. D'autre part, l'année 708 correspond à l'intégration du Maroc au sein de l'empire des Omeyyades. Dans le sillage des succès marocains, les armées arabes traverseront le détroit de Gibraltar sous le commandement de Tariq ibn Ziyad et atteindront la Navarre dès 715.
En 740, les tribus berbères adoptent le kharijisme jugé plus proche des principes de « démocratie tribale » que la doctrine omeyyade. Le califat qui refuse cette hérésie se replie, fragilisé depuis Damas par l'irrésistible ascension des Abbassides. Le Maroc connait l'anarchie.
L'histoire des Idrissides est indissociable de la personne d'Idriss Ier, descendant d'Ali et de Fatima, gendre et fille du prophète de l'islam Mahomet, qui fuyant les massacres dont était victime son entourage et sa famille vint se réfugier dans le Moyen Atlas, à Volubilis, ancienne cité romaine déchue. Obtenant l'aval des tribus locales, il fonda en 789 la ville de Fès dans la plaine du Saïss dont il fit la capitale de son nouveau royaume, le Maroc, proclamé en 791. Assassiné par un envoyé du calife Haroun ar-Rachid, son fils Idris II lui succède après une régence. Il étend sa capitale ainsi que son royaume et avance au-delà de Tlemcen, pris par son père dès 789 et assujettit de nombreuses tribus Zenata. Son successeur Mohammed fera construire la prestigieuse mosquée Quaraouiyine, une des toutes premières universités de l'Histoire. À cette période, Fès devient un des principaux centres intellectuels du monde arabe et attire d'éminents scientifiques et théologiens. Le royaume du Maroc étend régulièrement ses frontières mais se retrouve menacé par la puissante dynastie des Fatimides à l'est. Indiqués califes de Cordoue au début du xe siècle, les Idrissides subiront également au nord la pression des Omeyyades. En 985, les Fatimides et leurs vassaux d'Algérie poussent les Idrissides à se réfugier en Andalousie.
Dès le milieu du xe siècle, l'affaiblissement des Idrissides du fait non seulement des pressions externes mais surtout des dissensions internes entraine un regain d'activité des grandes tribus berbères qui fondent et conquièrent de nombreuses cités. Les états de Sijilmassa dans le sud et de Nekor dans le nord se maintiennent et gagnent de l'ampleur durant cette période.

Royaume de Sijilmassa (758-1055)

Un émirat fondé par les Zénètes émerge dans la région du Tafilalet à partir de 758. Dirigé par la dynastie des Midrarides (dont le fondateur est Semgou Ibn Ouassoul), il prend pour capitale la cité de Sijilmassa. Ce royaume professe officiellement le kharidjisme de rite sufrite mais finit par reconnaître à partir de 883 la suprématie religieuse du califat sunnite des Abbassides. Les Midrarides se consacrent cependant à maintenir une alliance avec les autres États kharidjites, comme le royaume des Rostémides de Tahert, et à établir un fructueux commerce caravanier de l'or avec le royaume du Ghana, à l'époque maître des plus importants gisements aurifères de l'Afrique de l'Ouest. L'émirat de Sijilmassa atteint ainsi son apogée au ixe siècle grâce à son rôle de plaque tournante du trafic des métaux précieux, et sa renommée s'étend ainsi jusqu'aux pays méditerranéens et au Moyen-Orient. C'est précisément cette position de débouché de l'or africain qui excite les convoitises des Omeyyades et des Fatimides qui s'affrontent pour sa domination. Ce sont finalement les Almoravides qui s'emparent du royaume midraride en 1055. Par la suite, la fondation de Marrakech éclipse définitivement le prestige de Sijilmassa.

Rôle des tribus au cours de l'histoire du pays


Comme dans l'histoire de très nombreuses nations à travers le monde, aucune dynastie marocaine (des Idissides aux Alaouites) ne pourra s'imposer par elle-même. Toutes devront, pour étendre et asseoir leur influence géographique sur des périodes plus moins longues, passer des alliances (intéressées, religieuses, maritales, forcées, pacifiques ou négociées) avec les différentes autres tribus musulmanes et parfois juives du pays. L'islam sera le principal ciment entre les différentes tribus qui composent le royaume mais ses interprétations feront naitre des conflits. Le fait que certaines dynasties se soient réclamées chérifiennes ne sera pas un atout suffisant à leur persistance.
Le Maroc restera longtemps un pays fortement tribal cela même après l'indépendance du pays en 1956. C'est la raison pour laquelle, de nos jours encore, les représentants des différentes tribus du pays continuent à réitérer leur allégeance au Roi au cours de la fête annuelle du Trône. Compte tenu des dissensions familiales et des luttes de pouvoir au sein des différentes dynasties marocaines successives tous les membres (sans exception) de la famille royale sont également tenues de prêter allégeance au Roi. Cette fête du Trône a pour but de souder et de rappeler le lien entre le monarque et le peuple en particulier à des moments difficiles de l'histoire du pays.

Maroc antique


À partir des années -3000 se développe au Maroc la culture campaniforme. Dès lors le Maroc entre dans l'âge du bronze et on assiste à la diffusion d'une céramique noire spécifique dont la présence est attestée dans un certain nombre de sépultures de la région rifaine.
À partir du xie siècle av. J.-C., les hardis commerçants phéniciens venus du Liban actuel atteignent les côtes marocaines et notamment la côte atlantique. Ils fondent de nombreux comptoirs qui serviront de bases à de nombreuses cités romaines puis arabes (dont les principaux furent Tingis et Lixus, actuelles Tanger et Larache). Au passage, c'est à cette période déjà que l'on date les toutes premières installations de populations juives au Maroc.
L'autonomie progressive de Carthage profite aux comptoirs phéniciens fondés sur les côtes marocaines dans la mesure où ils seront davantage mis en valeur du fait de la proximité relative avec la nouvelle capitale de l'empire punique. L'influence de la civilisation carthaginoise se fait grandement sentir auprès des populations indigènes dont l'organisation s'améliore parallèlement. Ainsi les tribus berbères se fédèrent progressivement, fondant des royaumes cohérents dont le premier sera le royaume de Maurétanie d'abord confiné dans le nord-ouest de l'actuel Maroc, et dont les souverains portent le titre d'Aguellid à l'instar des rois de Numidie. Le sud du pays est occupé par les Gétules et l'est par les Numides.
Du fait du soutien apporté par la Maurétanie à l'Empire romain lors de la destruction de Carthage, il se nouera une étroite amitié entre les deux États (d'où l'éviction du chef numide Jugurtha). Le roi Bocchus se voit même décerné le titre d'Ami du Peuple par le Sénat romain et gagne l'amitié du consul Caius Marius. Sous le règne de Juba II la Maurétanie devient un royaume vassal, réputé pour ses exportations de pourpre et de produits maritimes, assez riche pour tailler sa propre monnaie d'or. Une brillante civilisation urbaine se développe, influencée à la fois par l'héritage carthaginois et par les courants artistiques de la Grèce antique et de l'Égypte antique. De telles influences sont sans doutes dues au mécénat de la propre épouse de Juba II, la reine Cléopâtre Séléné, qui n'est autre que la fille de Marc Antoine et de Cléopâtre VII. Mais cette richesse attise la convoitise de Rome, et Ptolémée de Maurétanie, fils et successeur de Juba II, va en subir les conséquences.
Lors d'une invitation de Ptolémée à Rome, le dernier roi maurétanien est assassiné par l'empereur Caligula, ce qui entrainera après deux années de troubles une annexion de la Maurétanie (42 ap. J.-C.) que l'on désignera dès lors sous le nom de Maurétanie Tingitane, décrétée officiellement province impériale par l'empereur Claude Ier. Là encore, seul le nord de l'actuel territoire marocain est effectivement sous contrôle romain, le reste du territoire restant aux mains de tribus indépendantes. Les Romains fondent une cité prospère à Volubilis (non loin de l'actuelle Meknès). Néanmoins la capitale administrative demeurera Tingis, future Tanger, siège du procurateur, le gouverneur de la province, de rang militaire et appartenant à l'ordre équestre (chevalier romain). Durant toute cette période une grande autonomie est accordée aux différentes tribus (comme en témoignent les fameuses tables de Banasa), mais la constante pression des peuplades méridionales puis les crises internes à l'Empire auront progressivement raison de la Maurétanie Tingitane. Au iiie siècle sous le règne de Dioclétien la province est réduite à la côte nord et à Sala (actuelle Salé). Au cours de l'occupation romaine les cités, colonies de droit romain ou latin, se dotent de monuments civiques et utilitaires (temples, forums, basiliques, arcs de triomphe, thermes, et même théâtre à Lixus) et de résidences privées ornées d'œuvres d'art (sculptures, mosaïques) et destinées à l'élite maure romanisée. Les plaines cultivées sont partagées par l'aristocratie locale, qui s'enrichit notamment de l'exploitation de l'olivier dont les produits sont exportés dans les provinces voisines. Les terrains de parcours plus lointains sont laissés aux tribus nomades ou semi-nomades. Les ports de Tingis et de Sala connaissent une intense activité commerciale.
Les autorités recrutent des auxiliaires militaires parmi les Maures, destinés à servir notamment dans la cavalerie. Le plus célèbre d'entre eux, Lusius Quietus, fils du chef d'une grande tribu nomade des confins du Rif et des monts de l'Atlas, réalise une brillante carrière sous le règne de Trajan. Au nom de l'Empire, il combat les Daces et les Parthes, et conquit l'Arménie, la Médie et la Babylonie, puis pacifie la Judée en proie aux révoltes anti-romaines. Le prestige de Lusius Quietus devient tel qu'il est même envisagé pour monter sur le trône impérial à Rome en lieu et place d'Hadrien.
En 429, des tribus vandales originaires de Germanie traversent le détroit de Gibraltar mais dans leur imperturbable course vers ce qui demeurait de la mythique Carthage, ils ne contrôlent guère que le littoral méditerranéen, se désintéressant totalement de l'intérieur des terres. Un siècle plus tard, les Byzantins commandés par le général Bélisaire, désireux d'anéantir le royaume vandale pacifieront le nord du territoire, désenclavant par la même occasion les tribus maures du reste du pays. Le gouvernement de Constantinople sous Justinien Ier crée la province de Maurétanie Seconde, qui regroupe Tanger, Ceuta, Lixus et l'extrême sud de l'Hispanie, l'ensemble étant administré par un exarque et par des comes (comtes). Cette occupation byzantine perpétuellement menacée par les Goths au nord et par les Berbères au sud, va cependant subsister jusqu'à la conquête arabo-islamique.

Préhistoire et protohistoire


Les premières traces d'une présence d'hominidés sur le territoire marocain datent d'environ 700 000 ans. De cette période dite acheuléenne, on a retrouvé un certain nombre d'outils, notamment dans la plaine de la Chaouïa et plus précisément à proximité immédiate de l'agglomération casablancaise. Outre l'outillage, on a découvert un certain nombre de fragments humains notamment dans les carrières Thomas, près de Casablanca (mandibules, maxillaires et fragments crâniens d'Homo erectus)18. De l'époque moustérienne (120 000 à 40 000 ans BP), le site le plus explicite est celui de Jbel Irhoud situé à mi-chemin entre les villes de Marrakech et de Safi et où ont été découverts deux crânes d'hominidés, des outils associés à l'industrie levalloiso-moustérienne ainsi que d'importants restes d'animaux aujourd'hui disparus.


Extension de la culture ibéromaurisienne
L'époque atérienne (60 à 40 000 ans BP19) a apporté son lot d'outils pédonculés retrouvés dans de nombreuses grottes situées sur le littoral atlantique (Dar Soltane 2)20. Néanmoins cette période a surtout été marquée par de profonds bouleversements climatiques ayant entrainé une désertification sans précédent du territoire marocain ainsi que la raréfaction voire la disparition d'un grand nombre d'espèces animales et végétales. Cette dynamique a cependant été contrecarrée par le rempart naturel que constituent les chaînes de l'Atlas et du Rif, que ce soit au Maroc ou dans le reste du Maghreb.
L'arrivée d'Homo sapiens au Maghreb avant l'Épipaléolithique a été démontrée puisque les industries atériennes ne sont pas l'œuvre de l'homme de Néandertal, dont l'aire de répartition est exclusivement eurasiatique, mais bel et bien d'Homo sapiens présentant des caractéristiques archaïques.
Il y a environ 21 000 ans, la civilisation ibéromaurusienne voit le jour. Elle se caractérise par des rites funéraires plutôt évolués et par un raffinement de l'outillage utilisé. Néanmoins, il n'est pas encore question d'agriculture. La grotte de Taforalt dans la région d'Oujda correspond au plus grand gisement de l'époque. Cette civilisation se maintient et se répand sur l'ensemble du Maghreb avant de se métisser progressivement vers le neuvième millénaire avant notre ère avec les populations capsiennes, ancêtres des Berbères modernes. Les premiers éléments découverts correspondant à cette période (Néolithique) datent d'environ 6 000 ans. Ceux-ci témoignent d'une sédentarisation déjà avancée ainsi que d'une maîtrise relative des techniques agricoles.

Fondation du Maroc


Fondation du Maroc



Hymne du Maroc.
La fondation du Maroc, pays se considérant arabo-berbère, africain et musulman, se fait avec les Idrissides qui allièrent à leur cause diverses tribus contrôlant des petits royaumes ou territoires indépendants de tout pouvoir central. Au fur et à mesure des alliances, les Idrissides vont étendre leur influence territoriale avec des populations autochtones et lancer les bases de l'organisation d'un État constitué (Makhzen) reprises par les dynasties suivantes. Si les Idrissides vont commencer à dessiner les bases de l'État et des frontières de l'actuel Maroc ce sont les Almoravides qui en créant leur capitale Marrakech donneront au pays son nom (le nom Maroc est due à déformation linguistique française de Marrakech) ; ils consolideront et élargiront l'œuvre débutante et fragile des Idrissides ; les dynasties suivantes hériteront de l'expérience étatique précédente.
Même si d'autres civilisations du bassin méditerranéen (Rome, Carthage etc..) ont enrichi l'histoire du pays et même, si des populations de l'actuel Maroc vont participer à l'essor de ces civilisations, les historiens du Maroc les considèrent comme appartenant à des puissances étrangères, de surcroît non musulmanes, point important dans la définition du pays.
À partir des Idrissides, les dynasties qui suivirent et qui durent, elles aussi, établir des alliances avec des tribus de l'actuel Maroc, seront considérées comme marocaines par les historiens.


Monnaie Idrisside année 840, marque de la création d'un État
À l'époque des Idrissides, le Maroc s'appelle le Royaume de Fez. À propos du Maroc, le terme Empire est parfois utilisé car par définition, un empire est un ensemble d'États ou de royaumes (voir les différentes cartes du Maroc). Ceci explique l'appellation « villes impériales » utilisée encore de nos jours pour qualifier les villes de Fès, Marrakech, Meknès et Rabat17.
Lorsque le Maroc se fonde, le reste du Maghreb est éclaté sous forme de royaumes ou territoires indépendants, parfois concurrents ou en guerre, sans pouvoir central c'est-à-dire non organisés en État dirigé par des populations autochtones. L'organisation en État organisé permit aux Saadiens et aux Alaouites de s'opposer à l'avancée ottomane[réf. nécessaire] qui s'arrêta à la Moulouya et qui s'étendait sur une grande partie des autres pays arabes actuels.
Des désaccords apparus au début du xxe siècle dans la famille alaouite et dans le Makhzen plus globalement à la suite de problèmes de gestion du pays, créèrent une période d'instabilité (comme le Maroc en connut dans le passé) dont vont profiter plusieurs puissances coloniales (Allemagne, Angleterre, Espagne, France) pour essayer de s'emparer du pays qui possède entre autres une position géostratégique intéressante, à la veille de la Première Guerre mondiale. Après bien des tractations houleuses et secrètes qui faillirent déclencher dès 1912 la Première Guerre mondiale, le Maroc fut partagé entre la France et l'Espagne.

maroc


Le Maroc se dit en berbère lmruk (ⵍⵎⵔⵓⴽ en tifinagh), nom qui dérive de la prononciation Amur n'wakuc (« Amour » qui signifie « pays » et « Akouch » qui veut dire « Dieu » ce qui donne la « Terre de Dieu » ou la « Terre sainte »)12. Une autre étymologie donne l'interprétation de « terre de parcours13. » C'est aussi ce mot qui a donné le nom de Marrakech14.
Le Maroc se dit en arabe al-Maghrib (المغرب), ce qui signifie « le couchant » ou « l’Occident15 » (littéralement : « le Maghreb »).
Ce même mot, en arabe, désigne aussi le Maghreb au sens large16 ; aussi, lorsqu'il est nécessaire de préciser, on nomme le Maroc al-Maghrib al-’aqṣaą (المغرب الاقصى), signifiant « le Couchant lointain » ou « l’Extrême-Occident », et on désigne le Maghreb par al-Maghrib al-°arabiy (المغرب العربي), soit « l'Occident arabe ».


Village typique du Haut Atlas


Tamraght Plage
Le nom français Maroc dérive quant à lui de la prononciation portugaise de Marrakech, Marrocos, ville du centre du pays fondée en 1062 et qui fut la capitale de trois dynasties (celle des Almoravides, des Almohades et des Saadiens). De cette prononciation dérivent également Marruecos (en espagnol), Marocko (en suédois), Morocco (en anglais), et Marokko (en allemand, norvégien et néerlandais), les Persans l’appelant eux Marakech. Les Turcs l’appellent Fas qui vient du nom de l’ancienne capitale du Maroc sous les dynasties mérinide, wattasside et alaouite (avant 1912), Fès. Dans l’Antiquité, les Grecs appelaient les habitants de la région les Maurusiens. À partir de cette appellation, la région composée du Maroc et de l'Algérie occidentale fut connue sous le nom de Maurétanie (à ne pas confondre avec la Mauritanie). La région fut par la suite divisée en deux Maurétanies provinces par les Romains : la Maurétanie Tingitane avec Volubilis pour capitale (ancienne cité berbère d'Oulil) et la Maurétanie Césarienne avec Cesarea (Tipaza) pour capitale (centre et ouest de l'Algérie). Le Maroc était le pays où les Grecs anciens situaient le mythique jardin des Hespérides.
Le Maroc était connu sous le nom de Royaume de Marrakech sous les trois dynasties qui avaient cette ville comme capitale, puis sous le nom de Royaume de Fès sous les dynasties qui résidaient à Fès. Sous la dynastie des Alaouites, le Maroc était également appelé Empire chérifien. Cette appellation, très utilisée avant 1956, l'est restée de nos jours en référence au souverain alaouite, descendant du prophète de l'islam Mahomet, qualifié de « cherif » c'est-à-dire noble. Au xixe siècle, les cartographes européens mentionnaient toujours un « Royaume de Maroc » en en indiquant l'ancienne capitale « Maroc » (pour Marrakech). À l'indépendance, le pays prit le nom officiel de Royaume du Maroc et le sultan Mohamed ben Youssef en devint le roi sous le nom de Mohamed V.

maroc

Le Maroc, en forme longue le Royaume du Maroc, en arabe al-Maghrib, المغرب et Al Mamlakatu'l-Maghribiya, المملكة المغربية, en berbère Lmaɣrib, ⵍⵎⴰⵖⵔⵉⴱ et Tagldit N Lmaɣrib, ⵜⴰⴳⵍⴷⵉⵜ ⵏ ⵍⵎⴰⵖⵔⵉⴱ, ou encore le Royaume chérifien, est un pays d'Afrique du Nord appartenant au Maghreb. Sa capitale politique est Rabat alors que la capitale économique et la plus grande ville du pays est Casablanca. Le pays est bordé par l’océan Atlantique à l’ouest, par l’Espagne, le détroit de Gibraltar et la mer Méditerranée au nord, par l’Algérie à l’est. Au sud, le Maroc est bordé par le Sahara Occidental, territoire non autonome selon l’ONU, mais annexé majoritairement par le Maroc qui, de ce fait, contrôle notamment la partie Sud de sa frontière avec la Mauritanie. Le Maroc est membre de la Ligue des États arabes.

Le Maroc a pour régime politique une monarchie constitutionnelle dont le souverain actuel est le roi Mohammed VI, de la dynastie alaouite, établie depuis 1666 et l'une des plus anciennes du monde contemporain[réf. nécessaire]. Le Maroc est membre des organisations suivantes : Organisation des Nations unies, Ligue arabe, Union du Maghreb arabe, Francophonie, Organisation de la conférence islamique, Groupe des 77, Union pour la Méditerranée, Communauté des États sahélo-sahariens. Le Maroc est le seul pays africain à ne plus faire partie de l'Union africaine, mais peut bénéficier des services de cette organisation tels que les services de la banque africaine de développement. En 1987, le Maroc a tenté, sans succès, d'adhérer à la CEE, et s'est vu octroyer en 2008 un « statut avancé » auprès de l'UE8. Le 15 mai 2009, il a rejoint le Centre Nord-Sud du Conseil de l'Europe9. En juin 2004, en reconnaissance des liens étroits qui unissent les deux pays et en appréciation du soutien résolu du Maroc à la guerre contre le terrorisme, le président des États-Unis désigna le Maroc comme l'un des alliés majeurs hors-OTAN10.
Selon l'historien Bernard Lugan, c'est entre autres l'attrait des richesses provenant du commerce du Sud (Sahara) vers le Nord (l'Occident) qui va attirer les convoitises de diverses tribus avec pour ville carrefour Marrakech qui deviendra naturellement la capitale de diverses dynasties, en particulier celles venant du Sud (Almoravides, Almohades, Saadiens) ; toute l'histoire du Maroc (des Idrissides aux Alaouites) est ainsi marquée par le commerce des richesses du Sud vers le Nord. L'histoire et l'origine du Maroc furent, sont et seront marquées par le lien avec le Sahara11.

le roi mouhamed 6